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Ici, le terme Tipping Point est pris dans son sens en sociologie qui se rapporte à un moment dramatique où quelque phénomène singulier devient commun.
En 2014, le glacier islandais Okjökull s’éteint, premier glacier au monde reconnu comme « officiellement » disparu du fait des bouleversements climatiques et des pressions de l’être humain sur le système terre. En août 2019, une plaque commémorative a été déposée à l’endroit du glacier disparu. Ce ne sera probablement pas la première fois qu’un glacier disparait. Mais de mémoire d’homme, c’est sans doute une première, alors que des millions d'années ont été nécessaires pour créer ces glaciers qui s'éteignent en quelques dizaines d'années sous notre impact.
Cette tragédie représente un Tipping Point (point de bascule) à la fois climatique - un géant qui disparait - et humain - la reconnaissance officielle du phénomène - vers le Nouveau Régime Climatique (Bruno Latour) avec lequel nous devons composer...
L'installation Tipping Point est un travail sensible et poétique invitant le regardeur à assister à la naissance d’un glacier artificiel, goutte après goutte, inspiré par les « stupas de glace » qui naissent dans le Ladakh depuis 2014 sous l'impulsion de Sonam Wangchuk, destinés à lutter contre les pénuries d’eau lors des grandes sécheresses.
Vanité contemporaine évoquant notre désir d’immortalité, il faudra... le temps de l’exposition pour que le glacier grandisse, goutte après goutte, confrontant ainsi le regardeur au temps qu’il a fallu au système terre pour créer un glacier, ailleurs, en taille réelle.
Exercice déceptif pour le regardeur confronté à quelque chose qui n’est plus ou qui n’est pas encore, et pourtant, qui laisse place à la contemplation de ce qui a été et de ce que cela pourra peut être devenir : un glacier aujourd’hui disparu ou un nouveau glacier en formation, matérialisation du Tipping Point.
La poétique dégagée par l’installation ne s’arrête pas seulement à cette question du point de bascule tant on pourra trouver d’analogies avec l’épineuse question de la réparation d’un climat déréglé, de l’emprise de l’être humain sur son environnement ou l’accessibilité à l’eau douce... ou une évocation d’un laboratoire du vivant.